samedi 30 septembre 2017

Erdogan accueille son « cher ami » Poutine en Turquie alors que les deux pays affichent leur unité sur le Moyen-Orient


Le pivot de la Turquie vers l’Eurasie est en plein essor.


Le président turc Recep Tayyip Erdogan a accueilli le président russe Vladimir Poutine à Ankara pour ce qui a été décrit par Poutine comme une « réunion de travail ».
Erdogan a commencé en faisant l’éloge de l’intensification des liens économiques et politiques entre les deux pays, au cours de ce qui est sans aucun doute la meilleure période dans les relations historiques entre les deux pays qui se sont combattus dans plusieurs guerres au cours des siècles, et dont les relations étaient tombées au plus bas au 21ème siècle, récemment en 2015 .
Depuis 2015, lorsque la Turquie avait abattu un avion de chasse russe, tuant un pilote, les relations se sont rapidement améliorées, à la grande surprise des observateurs en Russie et en Turquie.
La Turquie et la Russie continuent de multiplier les efforts de coopération économique, y compris pour le gazoduc appelé le Turk Stream de la Russie vers l’Europe du Sud.
La Turquie a discrètement laissé tomber son soutien à la soi-disant opposition syrienne en Août de cette année, et les pourparlers de paix d’Astana se sont déroulés encore plus en douceur. Sans qu’il y ait eu de dialogue direct, la Syrie a accepté les accords rédigés par la Turquie et les partenaires de la Syrie, la Russie et l’Iran.
Au cours de leurs courtes déclarations aux journalistes, Erdogan et Poutine ont tous deux exprimé leur confiance dans le processus d’Astana. Vladimir Poutine a salué le rôle constructif de M. Erdogan dans la sécurisation du processus, et Erdogan dit avoir beaucoup apprécié les résultats positifs des négociations récentes à Astana. C’est effectivement un langage codé signifiant que la Turquie abandonnait totalement son opposition formelle au gouvernement en Syrie.
La prise de conscience par la Turquie des réalités pragmatiques du conflit que la Syrie est en train de gagner, en plus du fait que les relations économiques de la Turquie avaient pris le pas sur de vaines ambitions « néo-ottomanes », a clairement joué un rôle dans la confirmation du pivot géostratégique et géopolitique de la Turquie. En outre, dans le processus, la Turquie s’est encore plus rapprochée de l’Iran, à la fois en raison des relations de travail apparemment bonnes à Astana et aussi à cause du partenaire commun russe, en plus d’une vue similaire sur la crise du Qatar. Le point crucial c’est que la Turquie, l’Iran, la Russie, la Syrie et l’Irak font tous partie intégrante de One Belt-One Road de la Chine, une initiative qui va nécessairement rapprocher les pays, malgré de nombreuses différences généralement exagérées (sauf en ce qui concerne la Syrie et la Turquie, bien que cela aussi soit lentement en train de changer).
Alors que M. Erdogan a décrit Poutine comme un « cher ami » et a fait l’éloge de leurs appels téléphoniques fréquents et des relations chaleureuses des deux dirigeants, Poutine s’est plutôt focalisé sur le caractère pragmatique de la réunion. Erdogan a déclaré que la Russie et la Turquie soutenaient l’intégrité territoriale de l’Irak contre les sécessionnistes kurdes, alors que Poutine a simplement fait référence à une déclaration précédente du ministère russe des Affaires étrangères exprimant le soutien de la Russie pour l’unité de l’Irak. C’est l’attitude générale de la Russie qui a une approche moins idéologique de la question kurde que la Turquie qui considère l’indépendance kurde où qu’elle soit dans la région comme une menace directe à sa sécurité. En fin de compte, les deux pays ont une position similaire, mais la Turquie pourrait probablement intervenir militairement dans le nord de l’Irak alors que la Russie ne le ferait certainement pas. Déjà, Les troupes turques et irakiennes mènent des exercices conjoints sur le côté turc de la frontière à la suite de la tenue par les Kurdes d’un référendum sécessionniste inconstitutionnel. Poutine a clairement pris ses distances avec l’aspect plus militant de la politique de la Turquie sur cette question, comme l’on pouvait largement s’y attendre.
Erdogan n’a pas mentionné ses remarques qu’il avait faites antérieurement, pour un échange de prisonniers avec les États-Unis. Aujourd’hui, Erdogan a fait une déclaration adressée aux États-Unis, offrant la libération du prisonnier Andrew Brunson en échange du religieux turc en exil, rival de Erdogan et terroriste (selon la Turquie), Fethullah Gülen. Brunson, un citoyen américain, avait dirigé une église chrétienne dans le haut lieu Gulenist d’Izmir et est actuellement en prison en Turquie sur des accusations de terrorisme. Les États-Unis n’ont pas encore commenté l’offre, mais le refus de Washington de renvoyer Gülen à Ankara a été l’un des nombreux points de tensions entre les anciens alliés.
Toutefois, la déclaration la plus cruciale de la conférence de presse Erdogan-Poutine, a été quand Erdogan a parlé de l’Eurasie en disant « notre région ». En ce sens, la Turquie a officiellement quitté l’ouest dans un sens politique, même en conservant une adhésion de plus en plus inconfortable dans l’OTAN. La Turquie fait maintenant partie de l’Eurasie et la Russie a joué un rôle important dans le retour de la Turquie à la maison.

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